• Après la grande réunion (tout de même mensuelle) des ministres de la défense du Camp du Bien à Ramstein, où l'on entendit surtout des récriminations et des promesses insaisissables, la psychologie réalise que la Très-Grande Partie est engagée. • Plus personne ne se le dissimule : dans la bataille d'Ukraine, c'est la peau de la Russie que veut le 'Collective West'. • Pour la Russie, cela signifie que la "guerre totale" est engagée.• Sans doute parlera-t-on de Troisième Guerre Patriotique (et Mondiale).• Nous, nous parlons de fin de notre cycle métahistorique.
La réunion (vendredi) à Ramstein des ministres de la défense du 'Collective West' (combien étaient-ils ? 30 ? 40 ? 50 ? Qu'importe puisque ce sont toujours les mêmes mécaniques qui fonctionnent, parlent et décident). Là-dessus, on mesure la foudroyante dégénérescence de l'appareil politique de cette bande. Il y a 25 ans, 30 ans, 35 ans, c'étaient les réunions des ministres des affaires étrangères qui se faisaient pour décider de l'action politique à mener, qu'elle fût d'apaisement ou de menace. Aujourd'hui, ce sont les ministres de la défense, et l'on décide de la politique selon le poids des chars, qui enverra le premier, et les cris hystériques et Polonais appelant à raser le Carthage des temps modernes qu'est Moscou.
A part cela, quasiment pas de nuances entre les uns et les autres, ni de déviation de la ligne centrale du 'Delenda est'. Le seul point original que nous relèverons est la différence persistante entre le secrétaire US à la défense, - lourd, massif, sans originalité aucune, simple voix de la bureaucratie du Pentagone et de l'industrie d'armement, - et le général Milley, président du comité des chefs d'état-major, qui ne cesse de répéter à la moindre occasion que la situation de l'Ukraine est « très, très difficile », et qu'il serait peut-être habile de tenter de chercher une sorte d'accord de cessez-le-feu au moins temporaire avec les Russes. Milley semble la seule voix humaine indiquant une inquiétude quelconque vis-à-vis des perspectives de la bataille, ce qui reflète sans doute, - sans aucun doute, dirions-nous, - un sentiment sérieux chez les chefs militaires US.
Les divers bruits entendus et décisions annoncées, portant sur du matériel de plus en plus lourd, sur des perspectives de tir sur la Crimée, voire en Russie continentale et plus profonde, etc., ont tout pour activer l'incendie alors que les forces russes semblent avoir trouvé un très bon rythme et adoptent sur divers points une attitude offensive. Les Russes semblent désormais prêts après plusieurs mois de certaines hésitations et incertitudes (ce qui ne les a pas empêchés de prendre et de tenir une partie importante du Donbass).
Les annonces de renforcement faites dans la confusion (voit le cirque USA-Allemagne pour savoir qui ne sera pas le premier à livrer un de ses chars lourds) et ne contiennent aucune perspective d'une aide décisive pour les Ukrainiens qui sont dans une position de plus en plus difficile. Mais la rhétorique, le climat, l'ambiance, l'espèce de haine permanente qui caractérisent ces débats, rencontres et autres conseils de guerre, constituent une véritable "escalade" au sens militaire, sans les véritables moyens nécessaires à une relance d'une telle ampleur. Mais qu'importe : on sait que 90% et plus de l'action, aujourd'hui, est de la communication, - dans tous les cas pour le bloc-BAO.
« Les masques tombent »
C'est dire qu'on est en pleine escalade, - et les commentaires (ici ' SouthFront.org', sous le titre « Les masques tombent ») enregistrent l'événement de cette façon, comme d'une grande aggravation, ce qui inattendu et illogique, mais finalement se justifie... Ils constatent surtout une nouveauté dont tout le monde se doutait mais qui est dite désormais. L'objectif n'est plus dissimulé aujourd'hui : la destruction de la Russie, - et ainsi "les masques" tombent-ils...
« En janvier 2023, tous les masques sont tombés. Les élites euro-atlantiques, motivées après leurs réunions à Davos, ont compris qu'il n'était plus nécessaire de couvrir leurs véritables intentions par des appels hypocrites à "sauver la jeune démocratie ukrainienne pour le bien de la paix mondiale."De plus en plus de représentants du soi-disant " milliard d'or" de l'Occident reconnaissent les véritables objectifs de la politique belliqueuse qu'ils mènent contre la Russie depuis des décennies, à savoir la destruction de l'intégrité de la Fédération de Russie en tant qu'État et la privation du peuple russe de son statut d'État afin de prendre le contrôle d'énormes ressources qui "pour une certaine injustice historique appartiennent aux barbares russes". Le sort de l'État ukrainien et la vie de sa population ne les intéressent guère, car en cas de victoire, son territoire fertile deviendra un agréable bonus.» Les élites euroatlantiques ont déclenché et mènent une guerre agressive contre la Fédération de Russie dans leur intérêt personnel. De plus, le développement continu du conflit militaire, le manque de volonté politique de l'Occident pour le résoudre et le renforcement de la rhétorique belliqueuse avec la reconnaissance des véritables objectifs de la guerre indiquent que ces élites sont prêtes à escalader le conflit jusqu'à la troisième guerre mondiale, et même la menace nucléaire ne les arrêtera pas. »
Le même article de ' SouthFront.org' rapporte différentes interventions de personnalités antirusses clairement identifiées comme des objurgations à lancer une attaque contre la Russie elle-même. On y trouve les sornettes déjà signalées hier du Haut Représentant de l'UE Borrell, qu'on peut consulter à nouveau, comme excellente référence historique.
Il y a également l'intervention intéressante de la Vice-Première ministre canadienne Chrystia Freeland, dont on vous a déjà parlé avec tout son pédigrée, et qu'on devrait probablement retrouver parfaitement à sa place, comme première femme Secrétaire Générale de l'OTAN. Freeland nous promet, avec la fin de la Russie en 2023, des lendemains qui chantent et quasiment la fin de tous les malheurs des hommes et des transgenres. Affirmer de telles tornades de sottise nous laisse grand espoir pour l'avenir de l'OTAN.
« Au milieu des révélations des dirigeants occidentaux, les propos de la vice-première ministre et ministre des finances du Canada, Chrystia Freeland, ont paru particulièrement intéressants au forum de Davos. Elle a également soutenu la position de M. Borrel, précisant que la défaite de la Russie "serait un énorme coup de pouce pour l'économie mondiale". Mme Freeland, dont le grand-père était membre du groupe nationaliste OUN-UPA d'Andrei Melnik, a fait parler d'elle à plusieurs reprises ces dernières années en prenant la parole pour soutenir les nazis ukrainiens et en faisant des déclarations russophobes.» Une victoire de l'Ukraine dans sa guerre contre la Russie cette année "donnerait un énorme coup de fouet à l'économie mondiale", affirme Chrystia Freeland, vice-première ministre de M. Trudeau et membre du conseil d'administration du WEF.
» C'est la guerre du XXIe siècle pour les ressources, à grande échelle et en toute simplicité. - La porte-parole du ministère russe des affaires étrangères a commenté ses affirmations. »
De Lavrov à Medvedev
Dans cette période-clef (une de plus) que le secrétaire à la défense Austin a clairement qualifiée de "turning point" (un de plus), l'interprétation des Russes est clairement que l'"Ouest collectif" ne cherche même plus à cacher son engagement, ni à la moindre mascarade de maquillage, mais pose clairement sa volonté d'interventionnisme liquidateurs. (La Russie ? Une balle dans la nuque, comme faisait le NKVD.) Les officiels russes le disent au plus haut niveau, ils le disent avec une netteté sans crier gare ; Lavrov, par exemple, le 18 janvier :
« Ce qui se passe actuellement en Ukraine est le résultat des préparatifs des États-Unis et de leurs satellites pour le début d'une guerre hybride mondiale contre la Fédération de Russie. Personne ne cache ce fait. Cela ressort clairement des déclarations de politologues, de scientifiques et de politiciens occidentaux impartiaux. Dans son récent article, Ian Bremmer, professeur de sciences politiques à l'université de Columbia, écrit : "Nous ne sommes pas dans une guerre froide avec la Russie. Nous sommes dans une guerre chaude avec la Russie. Maintenant, c'est une guerre par procuration. Et l'OTAN ne la combat pas directement. Nous la combattons à travers l'Ukraine". Cet aveu est franc et cette conclusion est une évidence. Il est étrange que certaines personnes tentent de la réfuter. Récemment, le président de la Croatie, Zoran Milanovic, a déclaré qu'il s'agissait d'une guerre de l'OTAN. Une déclaration ouverte et honnête. Il y a plusieurs semaines, Henry Kissinger (avant qu'il n'exhorte l'OTAN à accepter l'Ukraine dans son récent article) a écrit en termes clairs que les événements en Ukraine étaient un affrontement, une rivalité de deux puissances nucléaires pour le contrôle de ce territoire. Ce qu'il voulait dire est assez clair.» Nos partenaires occidentaux rusent tout en essayant avec véhémence de prouver qu'ils ne combattent pas la Russie mais qu'ils aident seulement l'Ukraine à répondre à une "agression" et à restaurer son intégrité territoriale. L'ampleur de leur soutien montre clairement que l'Occident a misé gros sur sa guerre contre la Russie ; c'est évident.
» Les événements entourant l'Ukraine ont mis en lumière la poussée implicite des États-Unis à abandonner les tentatives de renforcement de leur position mondiale par des moyens légitimes et à adopter des méthodes illégitimes pour assurer leur domination. Tout est permis. Les mécanismes et institutions autrefois vénérés, créés par l'Occident dirigé par les États-Unis, ont été mis au rebut (et pas à cause de ce que nous voyons en Ukraine). Le marché libre, la concurrence loyale, la libre entreprise, l'inviolabilité de la propriété et la présomption d'innocence, en un mot, tout ce sur quoi reposait le modèle de mondialisation occidental s'est effondré du jour au lendemain. Des sanctions ont été imposées à la Russie et à d'autres pays répréhensibles qui ne respectent pas ces principes et mécanismes. Il est clair que des sanctions peuvent être imposées à tout moment à tout pays qui, d'une manière ou d'une autre, refuse de suivre aveuglément les ordres américains.
» L'Union européenne a été complètement subsumée par cette dictature américaine (il est inutile de s'étendre sur ce sujet). »
La conférence de Ramstein a été évoquée de façon plus directe par d'autres, en mettant l'accent sur des mesures évoquées désormais d'aide ou d'accompagnement US d'attaques ukrainiennes vers des territoires russes (dont bien sûr la Crimée et les territoires ukrainiens du Donbass passés sous administration russe).Il s'agit là de références à des attaques dont on connaît la forme, avec l'évocation de ripostes qui, à notre sens et selon la gravité la plus extrême que peuvent prendre ces attaques, pourraient impliquer des missiles hypersoniques auquel l'énergie cinétique donne une considérable force de frappe, même avec une charge conventionnelle (non-nucléaire). C'est le cas des hypothèses dans l'intervention du président de la Douma, qui représente sans aucun doute un message direct du pouvoir russe :
« Une "tragédie mondiale" pourrait s'abattre sur l'humanité si l'Occident continue de fournir des armes à l'Ukraine, a averti le plus haut législateur russe. Viatcheslav Volodine, le président de la Douma d'État, a également suggéré que Moscou pourrait riposter avec des armes plus puissantes, si son territoire était menacé.» Les remarques de Volodine sont intervenues quelques jours après une réunion à la base aérienne américaine de Ramstein, en Allemagne, au cours de laquelle les puissances occidentales se sont engagées à continuer de soutenir Kiev.
» Dimanche, M. Volodine s'est exprimé sur Telegram pour souligner que si les armes fournies par les États-Unis et les autres États membres de l'OTAN étaient utilisées pour "frapper des villes civiles et tenter de s'emparer de nos territoires, comme ils menacent de le faire", Moscou répondrait avec "des armes plus puissantes". »
Enfin, le même article déjà cité de 'SouthFront.org' signale diverses dispositions prises par les Russes dans leurs structures de sécurité et sur leur territoire, signifiant que la Russie s'engage désormais sur la voie et sur la nécessité d'une guerre totale avec l'Occident. On note par exemple dans ces mesures des "purges" écartant des fonctionnaires jugés trop accommodant avec 'Occident, sinon d'une tendance dite "occidentaliste" en Russie.
« Récemment, des rapports ont fait état de certains changements au sein de la direction politique et militaire russe. En particulier, certains fonctionnaires occupant des postes de haut niveau dans des organes politiques clés tels que l'administration présidentielle, le Conseil de sécurité, les services spéciaux, etc. ont été changés. Des inspections ont été lancées pour clarifier la conformité de plusieurs hauts fonctionnaires à leurs postes, leurs liens avec des pays étrangers et les éventuelles actions de corruption sont en cours de vérification.» Des changements ont également eu lieu au sein du ministère russe de la Défense. Le général d'armée Valery Gerasimov a été nommé commandant du groupe de troupes russes dans la zone d'une opération militaire spéciale (SVO) en Ukraine. Il a combattu les militants tchétchènes à la tête de l'armée, a organisé une opération en Syrie et dirige l'état-major général des forces armées russes depuis novembre 2012. Les changements au sein du commandement militaire russe pourraient indiquer la nouvelle étape des hostilités en Ukraine. De plus, de nouveaux généraux ont été nommés à un certain nombre d'autres postes clés du ministère de la Défense.
» En janvier, les militaires russes ont commencé à renforcer par défi le système de défense aérienne de la capitale. Ces derniers jours, des images de nouveaux systèmes de défense aérienne déployés près des centres de décision, comme le Kremlin de Moscou et le bâtiment du ministère de la Défense, ont été largement diffusées sur Internet. »
Après une année d'hostilité en Ukraine, les Russes sont arrivés à la conclusion qu'il est devenu impossible d'espérer un arrangement avec l'Occident dans les conditions actuelles, qu'il n'y a donc plus que l'issue du conflit. Même par rapport à la situation créée le 24 février 2022, c'est une situation complètement nouvelle qui s'est imposée avec la conférence de Ramstein prise comme événement symbolique de la volonté d'engagement des États-Unis.
Les Russes vont être forcés de passer à des opérations d'offensive plus profonde s'ils veulent effectivement soutenir ce rythme de "guerre totale" dont ils conviennent désormais de l'existence. Il n'est plus question de la seule Ukraine. On entre dans le domaine le plus pur et le plus inédit pour notre époque de la "guerre civilisationnelle" et les Russes vont devoir se préoccuper d'une action à l'échelle mondiale. Le mot de Medvedev sur les coalitions antiaméricanistes à former ne doit pas rester symbolique si les Russes veulent s'affirmer. Ils ont pour cela des instruments qu'il leur faut désormais tenter de politiser : les BRICS et l'OCS, notamment.
« "La réunion de Ramstein et l'attribution d'armes lourdes à Kiev ne laissent aucun doute sur le fait que nos ennemis vont tenter de nous épuiser pendant une période indéfinie, ou, de préférence, de nous détruire", a écrit l'ex-président.» Toutefois, la prolongation des hostilités en Ukraine pourrait finalement conduire à l'émergence d'un nouveau bloc militaire réunissant des nations "qui en ont assez des Américains", a suggéré Medvedev.
» "Cela s'est toujours produit dans l'histoire de l'humanité pendant les longues guerres. Les États-Unis finiront alors par abandonner la vieille Europe et ce qui reste des malheureux Ukrainiens, et le monde retrouvera son équilibre", a déclaré l'ancien dirigeant, avertissant toutefois qu'il pourrait être "trop tard" [à cause du nucléaire] avant que cela ne se produise. »
Du « turning point » au « perfect storm »
Que conclure de cette séquence ? Qu'une fois de plus règne la communication, c'est-à-dire l'information utilisée comme simulacre ou comme lanterne pour tenter de rencontrer une vérité-de-situation. C'est-à-dire qu'on ne peut avancer l'observation que des décisions radicales ont été prises à la réunion de Ramstein. Au contraire, on a vu mettre en évidence les querelles entre "amis", entre les Allemands attachés à ne pas précipiter leurs 'Leopard' dans des mains ukrainiennes, et les américanistes ordonnant à tout le monde de donner des chars en promettant de faire également don de quelques 'Abrams', mais plus tard ; on a appris là-dessus que la ministre des affaires étrangères allemandes, extrêmement pacifistes comme sont les écologistes, soutient les Polonais hystériques qui réclament au chancelier Scholz, effrayé, une donation immédiate de 'Leopard' aux Ukrainiens. Certes, il y a des rumeurs sur l'implication US dans des attaques ukrainiennes vers des territoires anciennement et nouvellement russes, mais ces rumeurs ne sont pas nouvelles, elles ne sont pas confirmées, elles viennent du New York 'Times' qui a peut-être voulu faire plaisir à ses amis neocons.
Il n'empêche : c'est bien un « turning point », comme dit l'impavide et massif Austin. Il dit tout le temps cela, mais cette fois cela pourrait être vrai. Il y a une conjonction qui est une vérité-de-situation qui compte : celle de l'évolution russe sur le terrain, vers la structuration d'une véritable armée de guerre, et l'évolution psychologique des Russes qui va avec. Les paroles de Lavrov, - encore lui, - aujourd'hui en Afrique du Sud sont terribles, lorsqu'il accuse l'Occident de préparer la destruction de la Russie depuis des décennies..
Partout s'installe la conviction qu'il s'agit d'une "guerre totale", sans doute la véritable Troisième Guerre Mondiale que nous annonçons et attendons tous (et surtout Troisième Guerre Patriotique pour la Russie ?), qui est et sera nécessairement d'une forme particulière, qui ne sera pas nécessairement l'apocalypse nucléaire, mais qui est certainement et d'ores et déjà une apocalypse psychologique. Ce dernier domaine (la psychologie) est si touché parce que cette guerre est une catastrophe terminale, une rupture de notre façon de percevoir le monde, une crise finale d'un cycle porté à son terme.
Le « turning point », qui est négocié déjà depuis quelques années, prend l'allure d'un « perfect storm », comme ils disent.
Mis en ligne le 23 janvier 2023 à 17H15